QUELLE FORMATION A LA CONSECRATION SECULIERE EN FRANCE ?

II nous faut d’abord ne pas oublier que le Formateur c’est Dieu et non pas l’institut. Ceci colore, fonde la manière de vivre la formation, tant du côté de l’institut que de la personne en formation. Le préfet de la congrégation de la vie consacrée dans le message final lors de la rencontre des formateurs à Rome le rappelle : « N’oubliez pas que c’est le Père qui forme en chaque personne la personnalité du fils par la puissance de l’Esprit : Vous êtes des médiateurs de cette action divine.

Comment être médiateurs de cette action divine dans un institut séculier où les personnes ont à éprouver (au sens de expérimenter, mettre à l’épreuve ) si leur appel est bien  de donner leur vie au Christ, par le chemin du  célibat, par amour préférentiel pour Lui,  non  seulement   en restant  dans les conditions ordinaires de la vie mais en reconnaissant que c’est là que Dieu les appelle a vivre leur consécration et leur mission ?Un appel où rien ne change extérieurement mais où tout est à laisser transformer de l’intérieur.

On peut dire que l’institut ne forme pas mais aide la personne à se laisser former par Dieu. Il   l’aide à repérer le travail de Dieu dans sa vie, à collaborer à ce travail, à discerner ses propres besoins de formation dans l’institut mais aussi ailleurs. Si l’institut propose des axes d’approfondissement, il est important que la personne soit artisan de sa formation. L’institut doit l’aider à repérer ce qui dans son propre appel consonne avec le charisme et la mission de l’institut.

La 2ème attitude sur laquelle l’institut doit être au clair pour ce qui le concerne c’est la gratuité. Il doit avoir prioritairement le souci d’aider la personne à fonder sa vie sur le Christ de plus en plus profondément, à se laisser conformer à Lui. Que la personne reste dans l’institut ou prenne un autre chemin, ce qui est premier c’est que son enracinement dans le Christ ait pu grandir, un enracinement qui la fasse croître dans sa propre humanité. Cela veut dire d’abord accompagner un chemin de vie, aider à en faire un chemin de croissance dans le Christ.

3ème point de vigilance On dit que la personne qui frappe à la porte, après un temps de regard demande à « entrer en formation ». Une formation sur une période de 8 a 10ans marquée par un premier engagement, des engagements temporaires puis un engagement définitif. Nous avons à ne pas oublier que lorsqu’ une personne « entre en formation » c’est aussi l’Institut  à  chaque fois qui « entre en formation ». Pourquoi je dis cela qui peut sembler paradoxal ? Parce qu’il s’agit d’accueillir une histoire avec ses richesses et ses zones d’ombre, façonnée par tel ou tel type d’éducation, de vie familiale, de milieu de vie etc. , une histoire sainte  dans laquelle Dieu a  travaillé bien avant que la personne ne frappe à la porte de l’institut .Le pape François dans la joie de l’Evangile  parlant de l’accompagnement  personnel des processus de croissance  dit « que tous apprennent toujours à ôter leurs sandales devant la terre sacrée de l’autre » …Nous sommes toujours à l’école maternelle pour cet apprentissage.

L’institut, les personnes chargées de formation mais aussi le groupe fraternel que va rejoindre la personne, sont appelés à accueillir l’histoire de la personne, mais aussi ses enracinements actuels,   tout ce  qui travaille la portion du monde dans laquelle elle est insérée (espoirs, révoltes, mutations, complexités de cette parcelle d’humanité car c’est là que Dieu l’appelle à vivre les béatitudes.

Oui l’institut entre en formation car il s’agit d écouter, d’essayer de sentir, comprendre ce que vit la personne dans cette portion d’humanité qui est différente pour chacune, ce qu’elle rejoint, ce qui la travaille, quels appels elle perçoit dans le lieu où elle est immergée ? Cela demande que chacune ou chacun se laisse déplacer par le monde dans lequel l’autre est immergé (2 exemples : une personne en formation qui traverse le chômage et en est à son 5ème ou 6ème CDD qu’est ce qui en elle grandit dans cette vie donnée au Christ non pas malgré cette précarité professionnelle mais à travers elle ?  Lorsqu’une personne avec des responsabilités en entreprise a été accompagnée dans sa formation dans un institut par une syndicaliste, conseillère aux prudhommes cela a demandé des déplacements, des conversions de part et d’autre pour accueillir le monde de l’autre, sans renier ses fibres profondes, car pour chacune c’est bien là où elle est que le Christ l’appelle à se laisser habiter et travailler par les espoirs, les angoisses des hommes.

Quels moyens l’institut peut il proposer ?

 L’accompagnement personnel dans l’institut a pour but d’aider la personne, si c’est son appel, à entrer progressivement dans l’Institut. Il se fonde sur une relation de confiance pour que la personne puisse exprimer à la fois sa vie et ses découvertes, ses difficultés au fur et à mesure qu’elle entre dans l’histoire, le charisme et la vie de l’institut. C’est la relation de confiance qui permet que la personne en formation puisse parler de sa vie relationnelle et affective. Beaucoup d’instituts demandent aussi que les personnes en formation soient accompagnées par un accompagnateur spirituel extérieur à l’institut et avec lequel l’Institut n’a pas de contacts au sujet de la personne. Cela pour une expression et une aide au discernement en toute liberté. IL est important que les instituts   soient attentifs à la formation des accompagnateurs et que les personnes chargées de formation soient une équipe et non une personne seule.

Le groupe fraternel est le lieu d’apprentissage de la fraternité pour vivre à l’extérieur une fraternité sans exclusive.  C’est le lieu où se tricote si j’ose dire, Parole de Dieu et paroles humaines. C’est aussi le lieu où se fait l’apprentissage d’une co-responsabilité car si l’institut s’engage à soutenir la personne dans sa vocation, la personne s’engage à soutenir aussi la vocation des autres par ce qu’elle partage, sa vie spirituelle et par son implication progressive. Le groupe fraternel ne doit pas être le seul lieu d’Eglise des personnes. Il est important que l’institut soit vigilant aussi à cela de même qu’il doit être attentif à l’implication de la personne dans la vie sociale

 il est nécessaire, que se vivent dans les groupes des approfondissements théologiques , bibliques et spirituels  qui aident à  toujours plus  accueillir cette Alliance de Dieu avec l’ humanité et son projet d’amour  en s’imprégnant de l’Ecriture au maximum. Il est fondamental aussi que nous nous entraidions à entrer plus profondément dans le Mystère Pascal qui ouvre au Royaume déjà là et pas encore pour pouvoir être guetteurs de ce travail de Dieu dans le monde. Nous n’avons pas à apporter Dieu dans nos milieux de vie comme s’il y était absent mais à être attentif au quotidien à tous les signes de vie qui font grandir le Royaume, y compris dans tout ce qui peut nous sembler des impasses, à toutes les quêtes de sens qui s’expriment et bien sûr à oser dire quand c’est possible ce qui nous fait vivre. Reconnaître au quotidien que Dieu travaille au cœur de l’humanité, dans cette création « dans les douleurs de l’enfantement » est un apprentissage jamais terminé.

Les diverses spiritualités auxquelles les instituts se réfèrent ont aussi des moyens qui aident à creuser le désir spirituel, à préciser tel ou tel accent fort dans la suite du Christ au milieu des hommes.

La relecture de vie (ou révision de vie) à la lumière de l’Evangile    que beaucoup d’instituts séculiers pratiquent (mais pas seulement eux) est un moyen de formation qui à la fois aide la personne à s’unifier, forge la vie fraternelle, soutient notre relation à Dieu et aux autres. Elle permet d affiner la qualité de présence à Dieu et aux autres.  Elle aide à devenir contemplatifs dans l’action. Les temps de rupture, retraites, temps de désert, sont vitaux mais tout aussi vitale la relecture personnelle   et en groupe fraternel des événements et des rencontres pour rendre grâces, s’émerveiller, crier vers Dieu avec ceux et pour ceux que la vie malmène. Le pape François nous le rappelle dans son message aux instituts séculiers italiens : « Tous les jours, il vous faut mener la vie d’une personne qui vit dans le monde, et en même temps il faut garder la contemplation, cette dimension contemplative envers le Seigneur et aussi à l’égard du monde, contempler les beautés du monde et aussi les gros péchés de la société, les déviations. Cela est toujours en tension spirituelle »

Annette GODART

IS Notre Dame du Travail

 

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